Le CNES a pour mission de développer les usages des technologies et données spatiales, au bénéfice des acteurs français publics et privés. Ces techniques (observation de la terre, télécoms spatiales, géopositionnement par satellite) sont particulièrement utiles pour gérer les situations de crise, notamment suite à des catastrophes naturelles.
En octobre 2018, c’est à l’initiative de la DDTM Aude que les moyens CNES ont été mobilisés en réponse à la crise pour accéder aux images satellite utilisées par le Centre Opérationnel de Gestion Interministérielle des Crises (COGIC) de la Direction Générale de la Sécurité Civile et de la Gestion des Crises (DGSCGC). Cet objectif a été rapidement atteint, permettant à la DDTM Aude de procéder à des analyses visuelles des images pour l'évaluation rapide des dossiers de calamités agricoles ou pour identifier visuellement des embâcles sur les cours d'eau dans des endroits rendus inaccessibles par la catastrophe (cf. communiqué de presse du CNES)
Les informations apportées par l’imagerie satellite se révélant particulièrement riches, un chantier de plus grande ampleur a été décidé conjointement pour évaluer exhaustivement, depuis l’espace et dans la durée, les conséquences des inondations. Un observatoire post-inondations des territoires touchés dans l’Aude combinant des prises de vue satellitaires régulières pendant 2 ans et de nombreuses informations de terrain, a été mis en place par la DDTM Aude et le CNES, via un accord spécifique de partenariat. Cet observatoire permet de suivre la dynamique de résorption des dégâts, avec en priorité : détection d’embâcles et atterrissement sur les cours d’eau et suivi des dégâts viticoles et pertes de sol.
Vigne fortement endommagée (photo DDTM)
Vignoble avant l'inondation |
Image post-crise - dégâts sur les vignoble |
Les images exploitées pour ce travail sont principalement issues des satellites français Pléiades (précision de l’ordre de 50 cm) et européen Sentinel 2/Copernicus (précision de 10 m). Pour les vignes, Sentinel2 est adapté pour voir les parcelles endommagées, et Pléiades pour estimer les dégâts intra-parcelles.
Le CNES a développé des algorithmes d’intelligence artificielle, avec des bases d’apprentissage spécifiques constituées grâce aux données terrain et à l’expertise de la DDTM Aude.
La base d’apprentissage est réalisée par photointerprétation d’images Pleiades acquises en Octobre et Novembre 2018. Des patchs de 41x41 pixels sont labellisés selon qu’ils contiennent ou non des vignes dégradées par l’inondation. Cette base d’apprentissage sert de vérité terrain pour entrainer un réseau de neurones convolutifs (CNN) qui produit une carte de prédiction des vignes dégradées. Des post-traitements permettent ensuite, en combinant avec des sources d’informations externes (RPG, distance au cours d’eau) de produire des cartes d’impacts. L’expertise de la DDTM11 a été absolument primordiale pour fournir des vérités terrain pour les algorithmes d’intelligence artificielle et pour la validation utilisateur nécessaire.
Les résultats des algorithmes d’intelligence artificielle sont cohérents de la vérité terrain fournie par la DDTM Aude. Ils permettent d’envisager avec confiance des traitements massifs, applicables sur l’ensemble du département, et reproductibles dans d’autres régions sur des évènements similaires. Au total, 1523 ha de vignes ont été dégradées par les inondations et 8% d’entre elles ont été arrachées. L’observatoire post inondations permet de suivre l’évolution exhaustive de chaque parcelle endommagée, et d’optimiser le travail des équipes de terrain.
Résultats de détection automatique de vignes dégradées sur des images Pléiades
Le département de l’Aude est devenu un territoire laboratoire pour l’utilisation des images satellites suite à une catastrophe naturelle, contribuant au développement de territoires plus résilients aux évènements extrêmes et aux travaux de réduction des impacts du changement climatique.
Les travaux menés en co-construction entre la DDTM Aude et le CNES constituent un laboratoire ancré sur le terrain, dont les résultats et les bonnes pratiques bénéficient au réseau métier des DDT et DREAL, DEAL, ainsi qu’aux acteurs du Plan d’Applications Satellitaires du MTES/MCTRCT.
Dans le cadre de l’Observatoire Spatial du Climat (SCO), le CNES envisage de rendre opérationnel ce type de démonstrateur afin de pouvoir répondre, en France métropolitaine, en outre-mer (St Martin - St Barthelemy/ouragan Irma) et à l’étranger (Haïti/ouragan Mathieu) aux besoins des territoires touchés par des évènements climatiques extrêmes.
Le CNES assure enfin les liens avec la science, contribuant à la compréhension des phénomènes extrêmes, à la mémoire du risque, et aux méthodes de prévention et réduction des risques.
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